lorsque février a déjà filé...

Publié le par Grenadine



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Oh, de l'herbe!

       Depuis quelques jours, le temps s'est radouci. On peut marcher dehors sans gants! Et puis les couleurs sont , les lacs se dégèlent et l'eau se remet à couler sous les ponts, doucement. Les trottoirs ont même perdu leur fonction "patinoire" et ça en devient presque ennuyant de marcher sans avoir le suspense du "Est-ce que vais glisser moins de 10 fois pour rentrer chez moi aujourd'hui?". Je ne me rappelais plus des couleurs d'Edina ; je m'étais habituée à ce décor noir et blanc dans lequel on a vécu toutes ces semaines. Le terrain de jeu de l'école, les jardins, les maisons... En une semaine, la neige est repartie aussi vite qu'elle était arrivée au début de l'hiver et il ne reste plus que quelques traces de la très épaisse couche qui semblait pourtant avoir réellement pris ses quartiers. Il faut savoir que "ça se réchauffe" à Edina a un sens très relatif. Je souris lorsque l'on est dehors, sans manteau, dès que le thermomètre est dans les positifs en disant "ouah!" ou encore quand je m'entends dire à mes élèves "Mais non vous n'avez pas chaud, il fait 2°C, mettez vos manteaux!" et à eux de me répondre, tous en coeur : "Siiii! on a chaud!" (arf). Alors que pour un Français ce serait un temps normal de mars, ici c'est la canicule. Les shorts et tongs sont de retour chez les élèves.

Mars, déjà?
          Le temps s'écoule trop vite. J'aurais aimé ne jamais voir cette neige s'en aller, finalement. Cela fait déjà plus de 7 mois que l'on est ici. Il nous reste seulement 3 mois d'école... Cette aventure défile à un rythme effrayant. On ne compte plus les jours passés mais ceux qui nous restent... Nous sommes alors arrivés à un stade où chaque intern d'Edina tente activement de trouver un futur (bientôt futur très proche). Bien sûr, l'idée de revenir en France nous paraît un peu fade, et puis les idées ne fusent pas. Heureusement, j'ai demandé à mes élèves et ils m'en ont trouvé plein, des idées. Je suis donc sauvée! Je n'ai plus à me soucier de mon avenir, je n'ai que l'embarras du choix entre testeuse de glace ("ice-cream tester", par Mia), dresseuse d'hippopotame ou encore archéologue sur Mars. Me voilà rassurée.
         Parfois, je regarde tous ces brics et bracs qui s'entassent, puis je pense à ces deux valises qui ne voudront vraiment pas tout ramener en France et je me dis "Oupsy!"... il va falloir commencer à y penser, sérieusement! Je n'ai vraiment pas hâte de voir l'heure du départ arriver. Et puis, de temps en temps, je réfléchis et je me demande comment ce sera de quitter tout ça... Je regarde mon quartier à travers la fenêtre tout en haut de ma tour de princesse bercée par les rires et les pas d'éléphant de Joe, poursuivi par Josh, probablement... Je sais que les Etats-Unis n'est pas un pays fait pour moi et n'en ferai pas une terre d'adoption ; j'aime trop errer dans les rues, marcher et crapahuter dans les vieilles ruelles pavées, être dans une foule sur une place animée, pour ça mais... Mais ces rencontres... Entre ces familles, ces interns, ces professeurs. J'ai trouvé ici une grande famille. Une famille d'interns et de jeunes joyeux exilés avec qui je me sens vraiment bien. Des familles d'adoption qui le temps de quelques mois, font de leur "chez eux" un "chez moi". Ces enfants, leurs parents, ma classe... C'est comme quitter un tableau plein de vie : tout laisser comme on l'a trouvé et s'en aller, 10 mois après, à pas de loup pour ne rien déranger, en y laissant le tableau vivre pareillement... sans nous...

"J'ai 7 ans! Ca fait bientôt 8 mois que j'ai 7 ans!"...
Etre entourée de ces petits loups chaque jour depuis plusieurs mois, ça fait rajeunir. Revenue au royaume de Peter Pan, je prends maintenant ça très au sérieux quand on me montre un trésor déguisé en caillou trouvé par terre et me surprends à être joyeuse pour la moindre petite découverte. J'aime aussi leur franglais qu'ils manient comme personne : "Est-ce que tu peux sharpener mon pencil" ou "j'ai besoin de put ça dans mon locker". Je m'habitue aussi aux anglicismes que j'entends à longueur de journée et qui deviennent maintenant pour moi dangereusement naturels : "Je suis faim" "Je suis fini". Alors on leur répond "Bonjour Faim, moi je suis Mlle Camille" ou "Si tu étais fini ce ne serait pas une si bonne nouvelle". Et imaginez-vous alors des bouts de 7 ans vous regardant avec un air de poisson-chat signifiant simplement "mais qu'est ce qu'elle a celle-là?!".
J'aime aussi leur spontanéité qui fait souvent sourire et qui peut être quelque peu gênante en face d'un visiteur. Comment rattraperiez-vous le coup si un de vos élèves demandait à un  homme aveugle venant les sensibiliser à son handicap : "Est-ce que vous comprenez le langage des signes?" ou encore un "Est-ce que vous chassez avec des flèches?" à une Indienne [d'Inde] venant nous présenter sa culture. Il faut savoir rebondir!
 J'aime jouer avec des marionnettes, ma main droite loup mangeant ma main gauche petit cochon et voir leurs têtes émerveillées. J'aime les journées pyjama à l'école, les "Mademoiselle Camiiiiille" suivis d'un câlin, passer mes journées à imaginer un monde plus coloré. Ma classe est loin d'avoir la réputation d'être la plus adorable, mais vous ne pouvez pas savoir tout ce que je leur dois, à ces bouts!


Quand une famille d'accueil n°2 devient une véritable famille d'adoption outre-mer.
         Je ne sais pas comment décrire le bonheur de se sentir chez soi dans une famille d'accueil. Je ne saurais même pas l'expliquer. Cela fait plus d'un mois maintenant que je vis chez eux, dans mon deuxième étage surnommé "the princess tower". C'est un match vraiment parfait. Nous nous sommes mutuellement adoptés au bout de deux jours et ce n'est que du bonheur. Avec le temps, j'ai appris à maîtriser cette maison high tech. Ici, tout est électronique et dirigé par un ordinateur central. Je trouve néanmoins que j'ai fait beaucoup de progrès : j'arrive à allumer les lumières (et ce n'était pas gagné), la télé deux fois sur trois (la fois où je rate c'est quand j'allume la télé de la pièce d'à côté à la place) et même mettre en route le cinéma toute seule. La vie dans cette famille est toujours ponctuée d'éclats de rires et de vie. J'aime passer des heures à chercher Waldo (Charlie) avec Joe, j'aime éclater de rire pendant de longues minutes avec Julie à cause de son humour particulier qui commence d'ailleurs à déteindre, j'aime quand Jim, complètement perdu en l'absence de sa femme me demande : "Heu, tu sais où est Josh? Est-ce que j'étais censé aller le chercher quelque part?" (heu...), j'aime jouer au baseball avec Jim et mes frères, sur le trottoir devant la maison, jusqu'à la nuit tombée et faire rire Joe parce que je rate les balles "faciles", je souris quand je croise Josh à l'école et qu'il me dit, d'un air froid "do I know you?" avant d'éclater de rire plus loin en me faisant un sourire, j'aime quand les garçons attendent depuis 6 heures du matin que je leur prépare des crêpes pour leur petit déjeuner même s'ils savent qu'avant 10 heures, je ne pointerai pas mon nez, j'aime aussi beaucoup quand Julie me réveille ainsi : "Camille, j'ai une bonne et une mauvaise nouvelle : la mauvaise c'est que tu dois te lever, la bonne c'est que je viens d'acheter des tickets pour voir Mamma Mia et on doit partir maintenant!". :). J'aime faire partie de cette famille. J'aime aussi pouvoir mener ma vie débordée en parallèle de la leur (busy aussi) et les retrouver, chacun arrivant en courant, une fois le rush passé. Bref, voilà le genre d'expériences à laquelle il doit être difficile de mettre fin. Cette rencontre n'a pas finie de rocker!
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